Les législatives au Royaume-Uni créent de nouvelles incertitudes pour les marchés
Le Royaume-Uni se retrouve avec un Parlement sans majorité à l’issue de législatives qui ont vu le Parti conservateur de Theresa May perdre des sièges (il lui en manque huit pour obtenir une majorité). Les jeunes semblent avoir voté en masse, principalement pour le Parti travailliste de Jeremy Corbyn. Le Parti conservateur reste toutefois la première force politique et formera probablement le nouveau gouvernement en s’appuyant sur le Parti unioniste démocrate, à tendance conservatrice, qui a remporté dix sièges. La Première ministre tiendra une conférence de presse à 10h00 et il est possible qu’elle annonce sa démission à cette occasion. Le résultat des législatives constitue pour elle un véritable camouflet dans la mesure où elle pensait conforter sa majorité. Ces législatives anticipées étaient censées déboucher sur un gouvernement « fort et stable ». À l’arrivée, le Parti conservateur est confronté à la possibilité d’une guerre de succession (qui commencera peut-être dès aujourd’hui), voire de nouvelles élections législatives d’ici quelques mois.
Ce regain d’incertitude est de nature à compliquer la tâche du Royaume-Uni dans les négociations avec Bruxelles, qui sont censées débuter le 19 juin. Le Parti conservateur a enregistré de piètres résultats dans les circonscriptions où les électeurs s’étaient prononcés pour un maintien au sein de l’Union européenne. Par conséquent, ce résultat reflète en partie un rejet de la position de Theresa May, qui considère qu’une « absence d’accord est préférable à un mauvais accord ». Il accroît la probabilité d’une sortie en douceur de l’UE, qui verrait le Royaume-Uni rester dans le marché commun, voire d’un autre référendum sur l’accord qui sera conclu avec Bruxelles (ce sera peut-être le prix à payer pour obtenir le soutien des libéraux-démocrates au nouveau gouvernement, même si l’annonce d’un second référendum aurait pour effet pervers d’inciter Bruxelles à offrir au Royaume-Uni des conditions peu avantageuses dans l’espoir que Londres les rejette). Bonne nouvelle toutefois pour ceux qui en ont assez des campagnes électorales : les mauvais résultats du Parti national écossais atténuent la probabilité d’un nouveau référendum sur l’indépendance de l’Écosse dans les années à venir.
La livre sterling s’est dépréciée dans la nuit mais a limité la casse face au dollar américain et à l’euro (-2 %). Le résultat des législatives a eu un impact limité sur le marché obligataire. L’affaiblissement des « Tories » pourrait se traduire à l’avenir par une austérité budgétaire moins prononcée mais il n’y aura pas de hausse significative des émissions d’emprunts d’État car l’objectif de réduction du ratio dette/PIB dans les prochaines années sera probablement maintenu. Dans la mesure où le Parti travailliste n’a pas obtenu des résultats bien meilleurs que prévu, les marchés n’ont pas à redouter de nationalisation ni de changement significatif de la fiscalité et des programmes de dépenses. Le marché des emprunts d’État n’est pas encore ouvert mais il devrait débuter la séance en très légère baisse. Les bons du Trésor américain n’ont pas enregistré de fluctuations significatives dans les échanges en Asie. Il faut dire que le résultat des législatives au Royaume-Uni n’est pas un événement susceptible d’alimenter l’aversion au risque à l’échelle planétaire. Le marché des obligations d’entreprises est légèrement dans le rouge. Les spreads des banques et des compagnies d’assurances britanniques se sont élargis de 5 pb. Le spread de l’indice iTraxx Main investment grade credit a augmenté de 0,5 pb. Ces fluctuations sont négligeables.
La croissance économique au Royaume-Uni a ralenti au fil des mois cette année. La progression des ventes au détail, les prix de l’immobilier et les revenus réels sont tous en berne alors que l’économie britannique repose largement sur la consommation. Le résultat de ces législatives et l’incertitude persistante qui en découle suggèrent que cette tendance perdura. La Banque d’Angleterre ne resserrera pas sa politique monétaire dans un avenir proche, même s’il est également exclu qu’elle baisse ses taux ou augmente ses achats d’actifs dans l’urgence, comme ce fut le cas dans la foulée du référendum sur le Brexit il y a un an.
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